Bourgades paisibles nichées dans les Andes colombiennes, cités enivrantes bordant la mer des Caraïbes, nous continuons notre découverte de la Colombie, en descendant maintenant vers le sud et la frontière de l’Equateur. Sur notre chemin nous croisons de nombreux témoignages de l’histoire du pays et du continent sud-américain. Entre légendes, mystères et croyances, notre périple s’annonce passionnant.
Mompox, gloire oubliée
Santa Cruz de Mompox a été fondée au seizième siècle par le gouverneur de Carthagène des Indes. Située sur des terres marécageuses, elle est entourée par les deux bras du Rio Magdalena, autrefois l’unique voie de communication entre la côte Caraïbe et l’intérieur des terres. La cité, protégée des pirates par son emplacement, jouait jadis le rôle d’un important port de marchandises. L’enlisement de la rivière l’a petit à petit rendue moins navigable, poussant les bateaux à trouver d’autres voies de déplacement. Mompox a alors été progressivement abandonnée. Aujourd’hui encore, l’accès en est difficile. Depuis Carthagène, qui n’est qu’à 200 kilomètres, nous roulons presque toute une nuit, empruntant des sentiers boueux et traversant les cours d’eau qui bordent la ville.
Mompox est aussi une ville clé de l’Histoire de la libération du continent. Ce fut la première cité de la Nouvelle-Grenade a avoir déclaré son indépendance. Le libérateur Simon Bolivar, lors de la Campagne Admirable visant à affranchir le Vénézuela du joug espagnol, y forma sa première armée composée de 400 braves paysans épris de liberté. Leur expédition fut couronnée de succès, installant durablement l’indépendance des nouveaux états sud-américains face à la couronne d’Espagne.
Bien qu’elle fut construite à la même époque que Carthagène, les deux villes ne se ressemblent guère. Mompox est baignée dans un silence étrange, il y règne une atmosphère reposante. Un soleil ardent éclaire les vieilles bâtisses coloniales. Des charrettes, tirées par des ânes, circulent dans les ruelles. Il n’y a pas de voitures. Trois grandes places, anciennement des villages indiens, s’alignent le long du fleuve. Chacune possède son église. Aux heures où le soleil est au plus haut dans le ciel, nous nous joignons aux habitants assis à l’ombre des arbres pour savourer de délicieux jus de fruit. Accrochés aux branches, quelques singes se chamaillent au-dessus de nos têtes.
Guatapé, une bande dessinée à ciel ouvert
Nous quittons les vestiges coloniaux pour nous rendre plus au sud, dans la ville de Guatape, où nous découvrons des traditions et des paysages uniques. Toutes les maisons sont recouvertes de peintures aux couleurs vives. Les murs sont décorés de bas-reliefs représentants des animaux, des scènes de la vie quotidienne ou des moments importants de l’histoire de la ville. Les rues sont de magnifiques bandes-dessinées représentant ici un sabotier à l’ouvrage, là le voyage d’un bateau vers des terres lointaines, ou un peu plus loin des enfants jouant avec un ballon.
Du haut de la Piedra de Peñol, un monolithe de plus de 200 mètres de haut, nous avons une vue imprenable sur un magnifique paysage. Les eaux retenues d’un barrage construit dans les années 70 ont formé d’innombrables presqu’îles dans le sol torturé.
A la découverte de la brillante civilisation paztèque
Architecture coloniale, grande Histoire et petites histoires, certes, mais n’oublions pas que ces terres ont été habitées bien avant l’arrivée des colons espagnols. Dans le sud de la Colombie, dans les montagnes situées au sud-ouest des Andes colombiennes, gisent sur des terres sacrées des vestiges d’une civilisation mystérieusement disparue : des sarcophages en pierre datant des époques précolombiennes, des créatures étranges mi-animales mi-humaines ou encore des monuments funéraires en forme de crocodiles.
Plus de trois cents sculptures mégalithiques monumentales parsèment le parc archéologique de San Augustin. Nous nous y promenons durant plusieurs jours, découvrant d’imposantes statues aux formes les plus étranges. Elles sont taillées d’un seul bloc dans une pierre volcanique. Certaines sont dressées vers le ciel, d’autres, blotties dans des tunnels, leurs points communs sont leurs longues canines acérées. Elles incarnent des dieux, des animaux ou des êtres surnaturels. Certaines créatures semblent porter des bébés à leur bouche, peut-être les témoignages d’anciens rites sanguinaires. Certaines d’entre elles étaient placées à l’entrée des chambres funéraires afin de protéger les sarcophages que l’on suppose réservés aux élites.
Nous savons peu de chose sur cette civilisation. D’après des chercheurs, le peuple de San Augustin aurait atteint son apogée durant les huit premiers siècles de notre ère. Les scientifiques ne sont cependant pas tous d’accord. Alors que certains archéologues datent ces sculptures du huitième siècle, d’autres estiment qu’elles ont été érigées juste avant la conquête espagnole. Les nombreux pillages qui ont eu lieu avant la découverte du site et les tremblements de terre successifs ont bouleversé les lieux et vidé les tombes, ce qui ne facilitent pas le travail des scientifiques. Des recherches conduisent à penser que le peuple de San Agustín aurait été contraint de quitter ses terres devant des envahisseurs hostiles, et aurait fui vers l’Amazonie et la région de l’Orénoque. Sa disparition serait survenue vers l’an 1300 de notre ère.
Le site de San Agustin est fascinant par les interrogations qu’il suscite. Les civilisations pré-colombiennes restent encore très mystérieuses pour les archéologues et ils en sont réduits à poser des hypothèses qui ne pourront jamais être confirmées. Face à ces sculptures impressionnantes nous souhaiterions pourtant en savoir plus. Nous quitterons les lieux avec plus de questions que de réponses.
Le dur chemin du pèlerinage
Dernière étape notre périple colombien : la ville d’Ipiales située près de la frontière équatorienne, là où se tient le pèlerinage le plus important d’Amérique du sud.
Ce qui devait n’être qu’un court trajet de bus (moins de six heures), s’est révélé une petite odyssée. Retard, changement de bus, problème de moteur, le voyage entre San Agustin et Ipiales débute mal. Alors que nous nous croyons enfin partis, le chauffeur s’arrête, se plonge dans le capot du bus, coupe quelques gros câbles par-là, en rafistole d’autres par ici. Le moteur semble réparé. Naïfs que nous sommes, nous nous pensons tirés d’affaire. Après quelques heures, alors que le soleil se couche, nous nous arrêtons de nouveau sur le bas-côté de la route. Le moteur a finalement lâché et nous ne pouvons plus repartir. Le chauffeur nous conseille de prendre un autre bus. Il en arrête un, et, accompagnés d’autres passagers, nous sautons dedans.
Nous arrivons à Ipiales en pleine nuit espérant pouvoir nous reposer. Malheureusement, les hôtels près de la gare routière, les hébergements dans le centre-ville, les motels en dehors de la ville, tous affichent le même écriteau : « no hay habitaciones » (pas de chambres). Après avoir erré pendant des heures dans les rues, un chauffeur de taxi nous abandonne dans un motel loin de la ville. Le personnel ignore s’il reste des chambres et nous conseille de patienter. Après une longue attente où nous sommes exposés au froid, à la pluie et au vent, on nous conduit à notre chambre. Epuisés, nous nous jetons sous les couvertures sans tarder.
Les habitants nous expliquerons plus tard que, Ipiales étant une ville frontalière et commerciale importante, les Equatoriens y viennent en masse acheter des produits lorsque le taux de change entre le peso colombien et le dollar américain (monnaie officielle de l’Equateur) est avantageux. Ces weekends, les hôtels de la ville sont alors pris d’assaut par une horde de personnes venues faire du shopping.
Les églises normalement c’est au milieu du village !
Le lendemain, nous partons visiter le sanctuaire de Las Lajas, une immense église néogothique située dans le canyon formé par la rivière Guaitara. Au XVIIIeme siècle, une petite fille muette y aurait vu la Vierge Marie et retrouvé la parole. Le jour suivant une peinture représentant Marie, l’enfant Jésus et deux moines, a été découverte sur un rocher à cet emplacement. Depuis une basilique a été construite, les pèlerins affluent et les guérisons inexplicables s’enchaînent.
Des fidèles, munis de fioles et de bouteilles en plastique, récupèrent l’eau qui coule sur les rochers. Un grand pont permet d’accéder à l’enceinte de l’église, enjambant la vallée. Sur le grand pont qui enjambe la vallée et permet d’accéder à la vallée des anges (des statues) font résonner les saxophones et vibrer les tambours. La cathédrale est pleine à craquer, les gens se bousculent, prennent des photos, essayent de s’approcher de la pierre sacrée.
De nombreux commerçants se sont installés sur le chemin d’accès. Les restaurants présentent fièrement la spécialité de la région : le cuì en broche ! Il ne s’agit rien de moins que d’un cochon d’inde, passé à la broche avec tête et pattes. Un met très apprécié du sud de la Colombie au Pérou.
Chroniques colombiennes
La Colombie est un livre d’histoire et de légendes que nous parcourons au hasard, découvrant des récits de ce qui fait son âme et qui rend ce pays si attachant. Anciennes civilisations mystérieuses, colonisation sanguinaire, lutte héroïque pour l’indépendance, grands miracles et petites anecdotes, il y en a pour tous les goûts. Nous ne pouvons que vous conseiller d’oublier tous vos préjugés et de venir découvrir la Colombie sous toutes ses formes.
Fred around the world
Article très intéressant et superbes photos ! Moi aussi j’ai adoré la Colombie, du coup j’y suis resté 2 mois ! Voir mon article en cliquant sur le lien…
Antoine
Salut les voyageurs! Mais où est passée la rubrique « c’est la première fois que…. » ???
Merci de faire partager vos aventures.
Sophie
mmm… c’est la première fois qu’on voit un cochon d’inde se faire rôtir à la broche !?